dimanche 25 janvier 2009

Cinéma cinémas, l'émission rêvée


Souvenez vous. Les années 80, la deuxième chaîne s'appelait encore Antenne 2 et le programme du soir commençait à huit heures et demi. Rien n'a changé me direz vous?

Si beaucoup de choses! une fois par mois en deuxième partie de soirée on a pu assister pendant une décennie à une émission exceptionnelle de cinema. Comme disait l'autre: "Cinema cinémas, ce n'était pas une émission sur le cinéma, c'était du cinema!". Dans mon souvenir on y interviewait des légendes hollywoodiennes devant leur piscine. En fait pas tant que ça de piscines dans la sélection que j'ai revisionné. En effet un coffret dvd de l'émission vient de sortir et je me suis plongé dedans avec délectation depuis Noël. Une sélection de 12 heures et pas une seconde d'ennuis. Déjà le générique... La musique irrésistible de Franz Waxman pour "Une place au soleil" version toutes cordes dehors. La camera glisse sur les chromos de Guy Pelleart représentant quelques scène mythologiques de l'histoire du cinema: Godard filmant Belmondo sur le capot de la voiture dans "A bout de souffle", Hitchcock tournant "La mort aux trousses" dans les studios de la MGM ou Anita Eckberg dans la fontaine de Trevi à Rome sous la direction de Fellini. Le nom des trois auteurs de l'émission s'inscrit en lettres rouges majuscules comme le nom des acteurs: Claude Ventura, Michel Boujut, Anne Andreu. Le tout est traversé par des bribes de dialogues de ces films "si il croit qu'il va me doubler celui là avec sa frégate à la con!" grommelle Belmondo ou l'insensée hurlement de Rita Hayworth à la fin de  "La dame de Shanghai": I DON'T WANNA DIE!!! qui la propulse pour toujours à la première place de mes actrices adorées. Ca glace le sang. Où est elle allée chercher ce cri? 

Lumière rouge. La cloche stridente du studio peut alors retentir pour le début du tournage ou plutôt de l'émission. Un homme en noir et blanc avance de dos au ralenti dans un couloir et ouvre toutes les portes. C'est Lemmy Caution dans "Alphaville" de Godard. Derrière chaque porte un sujet différent annoncé par la voix géniale de Michel Boujut et filmé en pellicule évidemment. Le titre apparaît en rouge avec le nom des auteurs du sujet. Car c'est bien de mise en scène dont il s'agit et non de promotions ou de quelconques reportages télévisuels... Et ce qu'on voit est fabuleux:

Samuel Fuller à la table de montage en train d'analyser la séquence d'ouverture du "Port de la drogue" avec Richard Widmark le pickpocket et Jean Peters sa victime. Fuller explique comment ce qu'on croit être New York est en fait une rue de Los Angeles!

Scorsese en 83 dans une limousine le menant à l'aéroport d'où il doit s'envoler pour Cannes, parlant beaucoup plus vite qu'aujourd'hui... Un débit de mitraillette!

Pialat en quête de l'instant vrai sur le tournage de "Police" avec Depardieu et une actrice non professionnelle. C'est le show du gros Gégé. Puis Depardieu interpelle un technicien "Marco Ferreri est sur Paris. Il a donné tout son pognon au parti communiste italien, Hi Hi!" "Et son yacht?" lui demande Pialat.

Orson Welles déjeunant au Fouquet's.

Delon ultra professionnel sur le tournage de "Notre histoire". Même l'équipe technique a peur!

Godard dans une voiture accusant les médias d'avoir tués Truffaut.

Lino Ventura ne comprenant pas son image de mec super intimidant "on dirait que je me balade avec une grenade dégoupillée à chaque main et un couteau entre les dents". C'est vrai qu'il fait peur!

Des acteurs dans des chambres d' hôtels qui parlent au téléphone. 

Cassavetes qui tourne "Love streams" chez lui avec sa femme, Gena Rowlands.

Les sujets poétiques de André S. Labarthe dit d'une voix d'outre tombe. Labarthe pèse les livres et rend hommages aux disparus.

Et Godard encore sur le tournage de "Détective" qui invective son chef opérateur dans son style inimitable et qui laisse aller sa haine des techniciens: "Vous les techniciens vous n'avez jamais rien inventés! C'est Hitler qui a inventé l'Arriflex". Pendant ce temps là Johnny Hallyday le nez collé à la fenêtre ne moufte pas... Ambiance.

Mais ce que je préfère par dessus tout ce sont les investigation hollywoodiennes de Claude Ventura et Philippe Garnier (oui mon journaliste préféré de la planète):

La recherche d'un hôtel abandonné dans le désert où Louise Brooks tourna l'un de ses dernier film... le Jacumba Hotel.

La visite de l'appartement de Scott Fitzgerald 40 ans après sa mort. On sent encore sa présence!

Franck Capra hyper poilu à Palm Springs. 

L'annonce passée dans Variety pour retrouver "Lolita" Sue Lyon. 

Les interviews pathétiques de Dmytrick et Stanley Donen qui n'arrivent plus à travailler.

L'improbable rencontre avec Sterling Hayden au petit matin à Sausalito. Hayden arrive dans son coupé décapotable Ghia au pare choc passablement endommagé. Puis il raconte sa folle vie sur sa terrasse face à la baie en sirotant un breuvage mystérieux...

Et puis la recherche de David Goodis par Philippe Garnier dans Los Angeles. Goodis écrivain américain venu de Philadelphie à Hollywood pour gagner sa croûte dans les années 40 comme scénariste. Il n'y a plus aucune trace de lui, enfin presque. Car Garnier qui se prend pour Marlowe retrouve les témoins un par un. De Union Station à Malibu, de la maison de retraite des "gens" du cinema dans les collines à un rade de downtown, le tout au volant de sa décapotable! Franchement un reportage comme ça à la télé c'est trop beau pour être vrai. Un régal.

1 commentaire:

Unknown a dit…

hi! do you speak english, I have a question about Jacumba hotel